
Cas d’étude : Un geste anodin, des conséquences dramatiques : l’histoire d’une source radioactive oubliée
Le 10 février 2025
Diagnostic immobilierLes cas pratiquesLes chroniques de la radioprotectionRisques d'expositionsCas d’étude : Un geste anodin, des conséquences dramatiques _ l’histoire d’une source radioactive oubliée ou perdu par un diagnostiqueur immobilier
C’est l’histoire d’un diagnostiqueur immobilier qui ne se doutait pas que sa journée allait prendre un tournant inattendu lorsqu’il enfourcha son scooter ce matin-là. Dans son sac à dos, parmi ses documents et son matériel de mesure, se trouvait une précieuse et dangereuse cargaison : une source radioactive de cadmium-109 (¹⁰⁹Cd), utilisée pour la fluorescence X dans l’analyse des peintures au plomb.
Un trajet mouvementé
En zigzaguant entre les voitures dans le trafic parisien, Antoine ne réalisa pas que la fermeture de son sac n’était pas totalement verrouillée. Après un freinage un peu brusque au niveau d’un feu rouge, le sac s’entrouvrit légèrement, laissant échapper quelques objets… et la capsule de cadmium-109, qui roula discrètement sur la chaussée
Un matin ordinaire, un destin brisé
Un passant curieux de nature, marche dans une rue lorsqu’il aperçoit un petit cylindre métallique abandonné au sol. Intrigué, il le ramasse, l’inspecte brièvement, et, trouvant l’objet plutôt insignifiant mais étrange, il le glisse dans la poche de son pantalon, où il restera pendant plusieurs heures.
Ce qu’il ignore, c’est qu’il vient de récupérer une source radioactive de cadmium-109 (¹⁰⁹Cd) utilisée en fluorescence X, probablement égarée par un diagnostiqueur immobilier.
Sans protection, au contact direct de sa peau, la source émet en permanence des rayonnements ionisants, traversant les tissus biologiques et endommageant ses cellules.
Calculs de radioprotection : une dose létale en quelques heures ?
Caractéristiques de la source de cadmium-109
- Activité typique d’une source pour fluorescence X : ~370 MBq (= 370 × 10⁶ Bq)
- Énergie moyenne des photons X émis : 22,1 keV
- Facteur de conversion dose (approximatif pour les rayons X dans les tissus mous) : 0,02 µSv/Bq·s
nota : Selon le rapport technique « External Dose-Rate Conversion Factors for Calculation of Dose to the Public » publié par le Département de l’Énergie des États-Unis (DOE) en 1988, le facteur de conversion pour le cadmium-109 est de 0,02 µSv/h par Bq/m³ pour une exposition externe dans l’air.
Évaluation de la dose absorbée
Le débit de dose DdD (en sieverts par seconde) est donné par la relation :
DdD = A (Bq) × C (Sv/Bq·s)
où :
- A est l’activité de la source en becquerels ( Bq )
- C est le facteur de conversion en sieverts par becquerel_seconde ( Sv/Bq·s )
DdD = ( 370 × 106 ) × ( 0,02 × 10−6 )
DdD = 7,4 × 10−3 Sv/s = 7,4 mSv/s
Sachant que l’exposition a duré 4 heures (soit 14 400 secondes), nous chercherons à démontrer, ici, la dose radiologique absorbée par les tissus de la cuisse du passant ayant mis dans sa poche cette source scellée de cadmium 109 :
Dose absorbée = 7,4 Sv × 10−3 × 14400 secondes
Dose absorbée = 106,5 Sv
Conséquences biologiques : une catastrophe corporelle
Les effets biologiques de l’exposition aux rayonnements ionisants sont bien connus. Voici ce qui pourrait se produire en fonction de la dose absorbée :
- À partir de 1 Sv : Début des symptômes de radiotoxicité (nausées, fatigue, diminution des globules blancs).
- À partir de 5 Sv : Risque de décès en l’absence de soins médicaux rapides.
- Au-delà de 10 Sv : Destruction massive des cellules, décès quasi-certain en quelques semaines.
Avec plus de 100 Sv absorbés localement, les tissus exposés (notamment la peau et les muscles de la jambe) subiraient :
- Des brûlures radiologiques sévères, apparaissant en quelques heures.
- Une nécrose tissulaire, nécessitant une amputation rapide.
- Un syndrome d’irradiation aiguë, pouvant entraîner un décès dans les jours suivants sans soins intensifs.
Une curiosité qui s’est avérée fatale
Le citadin commence à ressentir une douleur diffuse dans sa cuisse après quelques heures, comme une sensation de brûlure interne. Pensant à une irritation banale, il ignore les premiers signes. Ce n’est que le soir, en constatant une rougeur et un gonflement anormal, qu’il consulte un médecin. Mais le mal est déjà fait.
Le diagnostic tombe : irradiation sévère des tissus mous. En quelques jours, des ulcérations apparaissent, puis la nécrose s’installe. Malgré une tentative de greffe, les dommages sont trop importants. Une amputation de la jambe est décidée en urgence.
Ce qui n’était au départ qu’un objet curieux s’est transformé en drame biologique.
Conclusion : une vigilance absolue face aux sources radioactives
Cet exemple illustre le danger potentiel des sources radioactives, même de faible activité. Si elles sont mal gérées, perdues ou entre de mauvaises mains, leurs effets peuvent être dévastateurs.
C’est pourquoi toute personne trouvant un objet suspect doit immédiatement alerter les autorités plutôt que de céder à la curiosité, sous peine de conséquences irréversibles.
Christophe, NAVARRO, Auteur
NOVA RADIOPROTECTION ©
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